Le Haut Conseil pour le climat veut que la France sorte d’un traité protégeant les énergies fossiles

La Croix | 20 octobre 2022

Le Haut Conseil pour le climat veut que la France sorte d’un traité protégeant les énergies fossiles

avec AFP

Le Haut Conseil pour le climat (HCC) demande que la France et l’UE sortent du Traité sur la charte de l’énergie (TCE), jugeant ce traité incompatible avec « les calendriers de décarbonation » fixés dans l’accord de Paris pour lutter contre le réchauffement climatique.

L’Union européenne a obtenu en juin que soit réformé le méconnu Traité sur la charte de l’énergie (TCE), vieux de trente ans et trop protecteur des énergies fossiles. Mais le compromis est jugé insuffisant par les ONG, qui demandent aux Européens de s’en retirer.

Un traité datant de 1994

Dans un avis rendu mercredi 19 octobre, le Haut Conseil pour le climat (HCC) leur donne raison : « Aucun des cas de figure possibles à l’issue du quinzième cycle de négociations (…) ne permettra aux parties signataires de s’engager sur une trajectoire de décarbonation de leurs secteurs énergétiques respectifs à l’horizon 2030 et à la hauteur de l’ambition de l’accord de Paris », affirme cette instance consultative indépendante française.

Le Traité sur la charte de l’énergie a été signé en 1994, au sortir de la guerre froide, pour offrir des garanties aux investisseurs dans les pays d’Europe de l’Est et de l’ex-URSS. Réunissant l’UE et 52 pays, il permet à des entreprises de réclamer, devant un tribunal d’arbitrage privé, des dédommagements à un État dont les décisions affectent la rentabilité de leurs investissements, même lorsqu’il s’agit de politiques pro-climat.

« Multiplication des contentions »

Cas emblématique : après l’adoption d’une loi néerlandaise bannissant le charbon d’ici à 2030, l’énergéticien allemand RWE réclame 1,4 milliard d’euros à La Haye pour compenser ses pertes sur une centrale thermique.

Dans son avis, le HCC a épinglé la « multiplication des contentieux », qui entraîne une « perte de souveraineté » et risque « de limiter l’ambition des États » dans « la mise en œuvre de leurs politiques énergétiques et climatiques ».

Des écueils que le projet de modernisation du texte « n’écarte pas à lui seul », affirme le Haut Conseil, préconisant plutôt « un retrait coordonné du TCE de la part de la France et de l’UE, couplé à une neutralisation de sa clause de survie, qui protégerait encore pendant vingt ans les installations fossiles couvertes par le traité ».

Pays-Bas, Russie et Italie l’ont déjà quitté

Cette option est « la moins risquée pour respecter les engagements nationaux, européens et internationaux sur le climat », estime le HCC. Elle pourrait être « mise en œuvre sans délai » grâce à la proposition de la Commission européenne début octobre d’un accord additionnel entre les États membres confirmant « la non-application du TCE en intracommunautaire ».

Mercredi, les Pays-Bas ont déjà annoncé qu’ils quitteront, « de préférence avec l’ensemble de l’UE », le traité. La Russie s’en est retirée en 2009, suivie de l’Italie en 2015.

source: La Croix