Africa Intelligence | 28 septembre 2020
Al Kharafi-LIA : l’arbitrage à un milliard d’euros atterrit en cassation à Paris
Le groupe koweïtien Al Kharafi veut faire confirmer ses saisies des actifs français du fonds souverain libyen LIA, notamment l’immeuble de la Fnac des Ternes, à Paris. Mais la sentence arbitrale dont il se prévaut a été annulée par la justice égyptienne.
Le duel judiciaire entre le groupe koweïtien Al Kharafi et la Libyan Investment Authority (LIA) s’est déplacé à la Cour de cassation française. Selon nos informations, Al Kharafi, qui avait obtenu en 2013 devant une cour arbitrale égyptienne près d’un milliard de dollars de dédommagements après l’échec de son projet d’investissement touristico-immobilier près de Tripoli, a déposé le 10 septembre un mémoire en défense contre le fonds souverain libyen et sa filiale, Lafico. Les deux entités libyennes s’étaient pourvues en cassation fin 2019 après que la Cour d’appel avait confirmé les saisies-attributions menées par Al Kharafi sur leurs actifs français, en 2013. Ce mirobolant pactole comprend notamment l’immeuble de la Fnac des Ternes à Paris, évalué à plus de 250 millions d’euros, 151 millions d’euros d’Euro Medium-Term Notes (EMTN) déposés à la Société générale, et plusieurs centaines de millions d’euros de valeurs mobilières placées à la Banque BIA.
LIA et Lafico saisissables
Al Kharafi, qui était épaulé en première instance et en appel par Rémi Barousse (cabinet Tisias), est représenté devant la Cour de cassation par Alain Benabent, spécialiste du droit des obligations. Son mémoire, qui ne porte que sur des questions de procédure, vise à convaincre la chambre de cassation que, comme l’avaient estimé les juges d’appel, la LIA et la Lafico peuvent voir leurs biens saisis, étant des "émanations de l’Etat libyen". Et ce bien que Tripoli n’ait pas renoncé à son immunité d’exécution - qui protège justement les biens d’Etat contre les saisies - au moment de faire affaire avec Al Kharafi.
L’arbitrage du Caire annulé, mais...
Les cabinets Delvolvé & Trichet Avocats et Rousseau & Tapie, retenus respectivement par la LIA et Lafico, pourraient attaquer sur un tout autre terrain. L’arbitrage du Caire, sur lequel Al Kharafi a fondé toutes ses saisies d’actifs libyens à l’étranger, a en effet été annulé, en juin dernier, par la cour d’appel du Caire saisie par la direction du contentieux de l’Etat libyen. Le tribunal avait estimé que les dédommagements consentis à Al Kharafi étaient sans commune proportion avec ses pertes réelles. Il est vrai qu’il n’a jamais mené les moindres travaux sur le terrain de 24 hectares qu’il louait à l’Etat... Cette fois, c’est le groupe koweïtien qui aurait déposé un mémoire en vue de faire invalider la décision de la cour d’appel.